L'aube du troisième millénaire
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Ils ont creusé un trou au centre du terrain de jeu. C'était un beau trou rond
d'environ soixante centimètres de diamètre et d'un peu plus d'un mètre de
profondeur.

Ils y ont déposé le corps de la veuve Aïcha, les jambes soigneusement
bandées de linges bleus d'abord.

Aïcha pensait-elle à son beau, son doux, son merveilleux amant lorsque la
première pierre lui creva l'il droit ? Fut-elle soulagée de ne plus entendre les
piaulements des centaines de mâles de sept à soixante-dix sept ans lorsque deux
fragments de roche lui arrachèrent presque simultanément les deux oreilles ?

Le supplice dura une heure. C'était un quart d'heure de trop, car à la
quarante-troisième minute du temps règlementaire un projectile plus gros avait fait
éclater la boîte crânienne d'Aïcha. Mais la tête dépassait
encore du sol, seules les épaules s'étaient affaissées sur le corps
ratatiné. Ils continuèrent donc.

C'était en l'an 2001. Cinq cents ans plus tôt, les bourreaux des inquisiteurs
étranglaient leurs victimes avant de les jeter au bûcher.

Tu dis, ami lecteur amie lectrice ? Qu'en fier descendant des héros de 1789 tu trouves tout cela
absolument scandaleux ?

Bien ! Et tu fais quoi, ami lecteur amie lectrice ? C'est vrai : que peux-tu y faire ? D'ailleurs comme tu
dis, tu n'es pas un mauvais sujet : tu votes plutôt à gauche, tu as signé la
pétition pour le sauvetage des bouddhas de Bãmiyãn, tu t'imprègnes
de culture. Tu lis ces interludes.

Sale con pauvre conne.

Ô mon frère ô ma sur.

Qui vit une époque formidable
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